Communiqué CAPREQUINS #6

22 octobre 2014 Les partenaires financiers et opérationnels de CapRequins se sont de nouveau réunis le 9 octobre dernier  en présence du comité indépendant d’experts scientifiques pour établir un bilan intermédiaire du programme débuté depuis 9 mois en baie de Saint Paul et confirmer les modalités du déploiement, toujours dans un cadre expérimental, en zone corallienne sur le site des Roches Noires.

Avec la technique des « smart drumlines », dix-huit nouvelles captures ont été comptabilisées sur les quatre derniers mois, dont cinq seulement ont concerné les espèces accessoires suivantes :
– Une grande raie guitare femelle, capturée le 22 mai 2014 à 18h25, puis relâchée vivante après
marquage externe « spaghetti » ;
– Deux requins nourrice fauve mâles, déjà marqués dans CapRequins, capturés de nouveau
respectivement le 28 mai à 19h10 et le 4 août 2014 à 18h40, puis relâchés vivants. Il s’agissait pour l’un des deux animaux d’une deuxième recapture sur les « smart drumlines » ;
– Deux requins gris « d’estuaire » (Carcharhinus plumbeus ; 1 mâle et un individu de sexe non identifié), capturés respectivement dans la nuit du 19 juin 2014 et du 24 septembre 2014 à 4h20. Le premier a été retrouvé, sur l’hameçon au petit matin sans avoir déclenché le système d’alerte, vivant mais blessé à la queue par une petite morsure vraisemblablement le fait d’un congénère. Le choix de son prélèvement a été décidé aux fins d’analyses de détermination précise de l’espèce et scientifiques. Le second a été récupéré mort et à moitié mangé, vraisemblablement par un requin bouledogue au vu des traces de morsures et des détections acoustiques observées pendant cette période. Il s’agissait du premier phénomène constaté de déprédation par un requin de plus grande taille depuis le lancement du programme en janvier dernier. La majorité des captures opérée sur les drumlines s’est ainsi faite sur les deux espèces de requins ciblées pour la réduction du risque.

Sur les sept tigres capturés, trois de moins de 3,00 mètres (1,50 m ; 2,36 m ; 2,85 m) ont été marqués en acoustique externe afin d’être suivis dans le réseau des stations d’écoute déployées sur le littoral réunionnais. Les quatre autres tigres prélevés de 3,30 mètres de longueur moyenne ont tous été valorisés dans le cadre du programme Valorequins.
Sur les six bouledogues capturés, seule une femelle de 1,50 mètre a été marquée en acoustique interne ; tous les autres spécimens, de 2,83 mètres de longueur moyenne, ont été versés aux échantillons d’analyse de Valorequins.

Ainsi, après 9 mois d’expérimentation, le programme CapRequins en Baie de Saint-Paul affiche un taux de survie global après captures non ciblées sur les « smart drumlines » de 92,7%, avec 4 animaux récupérés morts sur 54 prises. S’agissant des relevés
des stations d’écoute acoustique autour de la zone d’étude de la Baie de Saint Paul, il a été constaté du début de la période hivernale jusqu’à la fin du mois de juin une recrudescence des détections de requins bouledogue.

Ce constat n’est pas différent de celui observé sur cette même zone, en 2013. Plusieurs jours à la fin du mois de juin 2014, des mâles et des femelles marqués ont ainsi été détectés, leur fréquentation de la zone d’expérimentation est ensuite devenue quasiment quotidienne en août puis en septembre. C’est aussi
sur cette période que les captures de requins bouledogue ont été les plus fréquentes sur les « smart drumlines » avec 5 spécimens capturés. Les premières analyses conduites sur les individus prélevés ont permis de relever la maturité certaine de leurs organes
sexuels et des signes probants d’une phase active de reproduction précédant leurs captures. Au niveau des premières hypothèses avancées, le principe de l’effarouchement n’a pas encore pu être confirmé. Sur les quatre requins marqués, seul le requin bouledogue juvénile femelle a été redétecté rapidement après son marquage à la côte dans la Baie de Saint-Paul.
Il peut s’agir d’un comportement de fidélisation à la zone, sur le même schéma que ce qui avait été observé par
l’Institut de recherche pour le développement (IRD) avec un jeune spécimen au niveau de l’Etang du Gol à Saint Louis. Néanmoins, cette fidélisation d’un jeune requin au site du projet, également riche en apports d’eau douce et en rejets terrigènes comme à Saint Louis, ne permet pas d’écarter définitivement l’hypothèse « d’effarouchement après capture » telle qu’émise sur les premiers mois de l’expérimentation. Il ne s’agit pas, contrairement à ce qui peut être lu ici et là, d’effaroucher des requins avec des appâts mais de vérifier que la capture de spécimens ne diminue pas la fréquentation de la zone d’étude par les congénères, comme
cela a pu s’observer en début d’expérimentation. Sur la base des données collectées au cours des 9 premiers mois expérimentation, d’une part, et de la recrudescence des détections dès le mois de juin, d’autre part, le comité scientifique indépendant, s’est penché sur la question de l’attractivité et de la fixation des requins dans la zone de déploiement des « smart drumlines ». L’interprétation de ces données semble écarter unanimement un quelconque phénomène d’attractivité à grande distance des requins dans la zone d’étude. Les visites de requins marqués ne semblent en effet pas plus fréquentes en présence d’appâts qu’en leur absence. La durée des visites continues de ces requins en période d’appâtage n’est pas non plus significativement différente de celles lorsque les appâts sont absents.

Néanmoins, le comité scientifique a invité à la plus grande prudence sur ces premières interprétations au regard de phénomènes encore peu statistiquement éprouvés et de la possibilité de phénomènes marginaux, masqués par des facteurs exogènes (comportement différent entre le jour et la nuit, influence des apports d’eau douce, phase de reproduction, …).

En accord avec les financeurs de CapRequins, le Comité régional des pêches maritimes et des élevages marins (CRPMEM) et ses partenaires (Prévention Requins Réunion, la Ligue réunionnaise de surf, l’association Squal’idées) ont ainsi engagé la phase de déploiement des « smart drumlines » dans les zones d’activités nautiques depuis le mardi 30 septembre 2014, en commençant par la zone des Roches Noires.
L’encadrement et la vigilance sont les maîtres-mots de ce déploiement progressif, sécurisé et sous suivi scientifique des smart drumlines en zone corallienne. Des médiateurs de surveillance et de prévention (MSP) de PRR sont mobilisés quotidiennement de 9 à 17 heures sur la nouvelle zone d’expérimentation
pour sensibiliser les usagers à la présence de drumlines, prévenir les comportements à risques et sécuriser les autres pratiquants. Des observateurs indépendants, issus d’associations d’usagers, de protection  de  l’environnement, des professionnels de la plongée, restent participatifs aux opérations et aux interventions. Un cahier d’informations et d’observations est disponible en consultation publique au secrétariat du service des plages de la mairie de Saint-Paul, au niveau de la base nautique de Saint-Gilles.

Les premiers résultats dans cette nouvelle zone d’expérimentation seront présentés au cours du mois de novembre 2014.

Avec la technique de la palangre de fond du programme WEST, 40 sorties ont été réalisées entre le 14 janvier et le 3 juillet 2014 pour un total de 4285 hameçons déployés au cours de 91 filages. Au cours de ces opérations, menées entre le Sec de Saint-Gilles et le large de Saint-Leu, on a compté 28 captures de requins tigre et 2 de requins bouledogue, tous vivants à la récupération au navire. Seuls deux requins ont été prélevés et valorisés au titre de Valorequins, les autres ont fait l’objet d’une relâche viable dans le milieu après, dans  certains cas, un marquage interne avec le concours des équipes de Squal’idées. Ces résultats ont été observés dans un contexte général de faibles détections de requins bouledogue dans la zone au large du port de Saint-Gilles pendant toute la durée de l’expérimentation. Les captures accessoires ont été nombreuses (70 poissons
dont 36% de raies pastenague, 26% de carangues gros-tête, 13% de raies guitare et 9% de requins pointe-blanche de récif Carcharhinus albimarginatus), pour la plupart libérées vivantes grâce aux opérations de pêche courtes.
Au total, le taux de survie des captures s’établit à 93% pour la technique de la palangre de fond du programme West. Les prochains travaux sur cette technique devront se concentrer sur une meilleure appréhension de la capturabilité de la palangre de fond envers les requins marqués en équipant la ligne de pêche de stations  d’écoute.

Concernant le respect de l’équilibre initial visé entre « prélèvements » et marquages, 25 spécimens des deux espèces ciblées sur les 51 capturés lors des opérations à la « drumlines » et à la palangre de fond, ont été relâchés après marquage.
Réitérant leur message de prudence en direction de tous les usagers, le CRPMEM de La Réunion et ses partenaires indiquent sur les prochaines semaines vouloir poursuivre l’expérimentation en cours en se focalisant sur les conditions d’efficacité de la drumline comme engin de pêche de réduction du risque requins.

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